L’index d’égalité professionnelle rend visibles des écarts que beaucoup préféraient garder dans les coulisses des services RH. En chiffrant les progrès vers une réelle égalité salariale, il transforme un engagement politique en indicateur public.
Pour les directions, l’exercice n’a rien d’anodin, car la note obtenue peut déclencher des tensions internes, voire une crise d’image. Entre obligation de résultats imposée par la loi et attente croissante de transparence des salaires, chaque point perdu interroge les promotions, les rémunérations, les choix de carrière. Le vernis craque.
De la promesse à la preuve : comment l’index égalité professionnelle a changé les règles du jeu
Avant 2019, l’égalité salariale reposait surtout sur des plans d’action peu contrôlés et des rapports sociaux difficiles à comparer. La loi du 5 septembre 2018, dite loi Avenir professionnel, a introduit un index chiffré imposé aux entreprises d’au moins 50 salarié·es en France.
Ce mécanisme change la façon dont l’égalité professionnelle est appréhendée par les directions et les partenaires sociaux. L’ancienne obligation de moyens se transforme en obligation de résultat mesurable : chaque année, une note sur 100 points doit être calculée, expliquée et rendue visible. La logique de publication annuelle sur le site Internet de l’entreprise fait entrer les écarts de rémunération dans le champ du pilotage stratégique.
- Suivi chiffré de l’égalité femmes‑hommes, comparable entre entreprises d’une même branche.
- Objectivation des écarts avec une méthodologie unique fixée par décret.
- Pression de réputation liée à la diffusion publique de la note.
- Outil de dialogue social utilisé dans les négociations sur l’égalité professionnelle.
Obligations, calendrier et publication : que doit réellement faire une entreprise au 1er mars ?
Pour chaque exercice de référence, les entreprises d’au moins 50 salarié·es doivent calculer leur index et le transmettre à l’administration. La déclaration s’effectue via la plateforme en ligne Egapro, qui centralise les données d’égalité professionnelle et permet un suivi national homogène des résultats par taille d’entreprise.
Les indicateurs et les mesures correctrices ne restent pas théoriques et doivent être partagés avec les représentants du personnel. Ils figurent dans la base de données BDESE, mise à jour au même moment que la déclaration, et, avant la date limite 1er mars, l’employeur prépare aussi la communication au CSE sur la note obtenue, les écarts constatés et le calendrier d’actions prévu pour les trois années à venir.
En 2023, le ministère du Travail a rappelé que le défaut de calcul ou de publication au 1er mars expose l’entreprise à un contrôle ciblé de l’inspection du travail et à une éventuelle pénalité financière.
Mesurer sans trahir : la mécanique des indicateurs et leurs 100 points racontée pas à pas
Créé par la loi « Avenir professionnel » du 5 septembre 2018, l’index d’égalité professionnelle oblige les entreprises d’au moins 50 salarié·es à chiffrer leurs écarts femmes‑hommes. Le calcul porte sur l’année civile écoulée et aboutit à une note synthétique publiée chaque 1er mars sur le site de l’entreprise et sur le portail Egapro.
Cette note agrégée sert de référentiel national et permet de comparer les entreprises entre elles, secteur par secteur. Elle repose sur un barème sur 100 points structuré autour de cinq indicateurs, ou de quatre pour les structures de 50 à 249 salarié·es, où l’écart de rémunération pèse 40 points et où des indicateurs par taille complètent l’analyse par les données d’augmentations, de promotions, de congé maternité et de hautes rémunérations.
Écart de rémunération : le pilier qui pèse 40 points
L’indicateur principal de l’index mesure l’écart de salaire entre femmes et hommes sur les rémunérations fixes et variables, hors primes liées aux conditions de travail ou à l’ancienneté. Pour objectiver ce résultat, les salarié·es sont réparti·es par tranche d’âge et par niveau de poste, puis l’entreprise réalise une comparaison par catégorie entre les moyennes de rémunération de chaque groupe. Le calcul s’effectue sur les données de l’année N‑1 et ne retient que les populations d’au moins trois personnes par sexe, ce qui peut conduire à exclure certains services ou métiers très féminisés ou très masculinisés. L’écart obtenu, exprimé en pourcentage, est ensuite transformé en points selon un barème national allant de 0 à 40.
Les salaires sont au préalable convertis en équivalent temps plein pour neutraliser les effets du temps partiel et des entrées ou sorties en cours d’année. Sur cette base, le calcul retient le salaire équivalent temps plein moyen des femmes et celui des hommes dans chaque tranche, puis mesure l’écart relatif. Un écart inférieur à 5 % permet d’obtenir 39 ou 40 points, alors qu’un écart supérieur à 20 % conduit à zéro. Dans la pratique, de nombreuses entreprises affichent une note supérieure à 30 sur cet indicateur, alors que les statistiques nationales rappellent un écart global de 22,2 % tous temps de travail confondus.
Augmentations, promotions, congé maternité : le trio qui révèle les trajectoires
Un deuxième volet de l’index observe la façon dont les hausses de salaire sont distribuées entre femmes et hommes sur l’année écoulée. L’indicateur compare la proportion de salariées et de salariés ayant bénéficié d’augmentations individuelles, qu’il s’agisse de revalorisations liées à la performance ou d’ajustements ponctuels. Pour obtenir la totalité des 20 points, l’écart de taux entre les deux sexes doit rester inférieur à 2 points de pourcentage. Au‑delà, la grille retire progressivement des points, jusqu’à zéro lorsque l’un des deux groupes n’a quasiment pas été augmenté, ce qui arrive encore dans certaines entreprises de moins de 250 salarié·es.
Dans les entreprises d’au moins 250 salarié·es, un indicateur spécifique suit les promotions internes sur l’année, tandis qu’un autre contrôle le traitement des salariées de retour de congé maternité. Le premier vaut 15 points et compare la part de femmes et d’hommes promus vers un niveau supérieur. Le second, aussi noté 15, vérifie que toutes les salariées revenues de congé ont bénéficié des augmentations générales et individuelles décidées pendant leur absence. Ce trio d’indicateurs éclaire la qualité des trajectoires : il met au jour des plafonds de verre ou des pénalités de maternité qui ne se voient pas toujours dans le salaire annuel brut.
Quand les chiffres racontent des réalités contrastées : secteurs, tailles d’entreprises et écarts persistants
Les données publiées chaque 1er mars par le ministère du Travail montrent que l’index d’égalité professionnelle progresse à un rythme inégal selon les activités. Derrière une note moyenne nationale située autour de 88 points sur 100 se cachent des écarts marqués entre industrie, services, commerce ou santé. Les premiers résultats 2025 confirment cette dispersion, avec des secteurs féminisés qui obtiennent de bonnes notes mais conservent des écarts de salaire, et d’autres, plus masculins, où les promotions restent concentrées sur les hommes.
Selon la taille de l’entreprise, les leviers d’action ne sont pas les mêmes. Les grandes sociétés, mieux dotées en données et outils, identifient plus finement les écarts sectoriels, mais cumulent encore les plus forts écarts de rémunération, l’écart global atteignant 22,2 % en France.
- Les secteurs très féminisés, comme le soin ou le social, obtiennent des scores satisfaisants mais concentrent de nombreux emplois faiblement rémunérés.
- L’industrie et la construction restent marquées par une sous-représentation des femmes dans les postes qualifiés et les fonctions d’encadrement.
- Les entreprises de plus de 1 000 salariés affichent des dispositifs structurés, mais aussi des écarts de carrière plus visibles.
- Les structures de 50 à 250 salariés sont plus proches du terrain, avec des pratiques parfois agiles, mais des outils de suivi moins développés.
Sous le capot des scores : comment une bonne note peut cohabiter avec des inégalités bien réelles
Une entreprise peut afficher 95 sur 100 à l’index d’égalité professionnelle et conserver pourtant des écarts durables entre femmes et hommes. La note agrège des moyennes, des arrondis et des seuils qui gomment certaines disparités salariales. L’écart global de rémunération reste autour de 22,2 % en France, malgré des publications annuelles plus nombreuses.
Derrière un bon score se cachent par exemple des marges de tolérance qui neutralisent certains écarts, ou une faible granularité des données par âge et par catégorie de poste. Ces choix rendent peu visibles les conséquences du travail à temps partiel, très féminisé, sur les trajectoires de carrière et les bonus. Une lecture critique des résultats devient alors nécessaire pour saisir les limites réelles de la mesure Quelques situations concrètes l’illustrent.
- Un écart de rémunération jugé “acceptable” par l’index peut correspondre à plusieurs centaines d’euros bruts mensuels pour les salariées concernées.
- Des entreprises obtiennent plus de 90 points alors que les femmes restent absentes des dix plus hautes rémunérations.
- Des hausses ciblées sur quelques profils suffisent parfois à franchir 75 points sans corriger les écarts structurels.
- Les secteurs très féminisés présentent de bonnes notes, tout en concentrant les emplois les moins rémunérés.
Les marges de tolérance qui lissent les écarts
Lorsque l’index égalité professionnelle a été construit, des marges statistiques ont été intégrées pour éviter des conclusions instables dans les petites populations. L’indicateur d’écart de rémunération accorde les 40 points si la différence calculée reste inférieure à 5 %, ce qui revient à considérer ce niveau comme un seuil de pertinence. Dans la pratique, un écart de 4,9 % n’est donc pas distingué d’une stricte égalité, alors qu’il peut représenter, sur toute une carrière, plusieurs milliers d’euros de manque à gagner pour les salariées concernées.
La granularité et l’instantané : des photos qui manquent le film
Le calcul repose sur des catégories larges par tranches d’âge et niveaux de responsabilité, et la comparaison se limite à une photo à un instant T de la situation, au 31 décembre de l’année de référence. Des promotions concentrées juste avant la période d’observation ou, au contraire, différées de quelques mois, peuvent ainsi modifier nettement la note sans changement profond dans l’organisation du travail. Les écarts qui se construisent sur vingt ans de carrière, entre entrées plus tardives dans les postes de management et interruptions plus fréquentes, échappent largement à ce cadrage annuel.
Ce que l’index ne voit pas : temps partiel et ségrégation des métiers
L’outil se concentre sur les écarts à l’intérieur des entreprises mais dit peu de choses sur la répartition des femmes et des hommes entre métiers, territoires ou types de contrats. La forte ségrégation professionnelle place encore beaucoup de femmes dans les services administratifs, le soin ou la vente, où les grilles de rémunération sont plus basses. Ces caractéristiques se combinent avec les bas salaires et le temps partiel subi ou choisi, ce qui explique qu’un index élevé puisse coexister avec un écart global de revenus particulièrement marqué à l’échelle de la vie active.
Sanctions, négociation et correction : que se passe-t-il quand l’index passe sous 75 ?
Quand la note de l’index égalité professionnelle descend sous 75, la situation bascule dans une zone de vigilance renforcée. Ce score correspond au seuil critique 75 points fixé par la loi du 5 septembre 2018 relative à la liberté de choisir son avenir professionnel. À partir de là, l’employeur doit analyser finement les écarts révélés par les indicateurs, associer les représentants du personnel et documenter les causes structurelles des déséquilibres entre femmes et hommes.
Dans les trois ans qui suivent le premier score inférieur à 75, l’entreprise doit définir des mesures correctives chiffrées, les publier sur Egapro et dans la BDESE, puis en rendre compte chaque 1er mars. À défaut de progrès suffisant, l’administration peut infliger une amende jusqu’à 1% de la masse salariale annuelle.
| Situation de l’index | Obligations légales principales | Délai indicatif | Risque de sanction financière | Illustration chiffrée |
|---|---|---|---|---|
| 75 à 100 points | Publication du score sur le site de l’entreprise et sur Egapro, information dans la BDESE | Au plus tard le 1er mars de chaque année | Pas de sanction spécifique liée au niveau de l’index | Entreprise de 250 salariés affichant 82 points, sans risque d’amende |
| Index < 75 points (première année) | Définition d’un plan d’action et d’objectifs de progression, information du CSE | Plan à formaliser et publier dans l’année suivant le calcul | Absence d’amende immédiate, mais contrôle possible de l’inspection du travail | Entreprise de 500 salariés à 70 points qui engage un plan sur les augmentations |
| Index < 75 points pendant 3 années consécutives | Justifier des actions menées et de leurs résultats devant l’administration | Maximum 3 ans pour remonter au moins à 75 points | Amende administrative jusqu’à 1 % de la masse salariale brute annuelle | Masse salariale de 3 M€ : pénalité maximale possible de 30 000 € |
| Entreprises de moins de 50 salariés | Pas d’obligation de calculer l’index, mais égalité salariale tenue par d’autres règles | Sans objet | Pas de sanction liée à l’index, mais contrôle possible sur l’égalité de rémunération | Structure de 40 salariés non assujettie à la publication de l’index |
Le régime des pénalités et leurs montants
Dans la loi, la sanction financière attachée à un index inférieur à 75 peut aller jusqu’à 1 % de la rémunération brute versée l’année précédente. Cette sanction prend la forme d’une pénalité sur masse salariale, recouvrée comme une créance de l’État, après décision motivée de l’autorité administrative. L’inspection du travail et la Dreets examinent la cohérence entre le diagnostic, les objectifs chiffrés et les moyens réellement engagés pour réduire les écarts de rémunération et de carrière.
L’amende n’est pas automatique : elle intervient lorsque l’entreprise n’a ni rétabli sa note au-dessus de 75 dans le délai de trois ans, ni démontré des progrès crédibles. La décision tient compte du secteur, de la taille de la structure, mais aussi de la situation économique. En cas de désaccord, l’employeur peut contester la pénalité devant le juge administratif, qui contrôle à la fois la légalité de la procédure et la proportionnalité du montant retenu.
Le dialogue social comme levier : accords, décisions unilatérales, CSE
Quand l’index reste sous 75, les directions des ressources humaines doivent s’appuyer sur le dialogue social pour construire un plan de rattrapage crédible. La loi impose une négociation obligatoire sur l’égalité professionnelle et la qualité de vie au travail dans les entreprises dotées d’un délégué syndical. Cette négociation permet de fixer, dans un accord collectif, des objectifs chiffrés sur les salaires, les promotions ou le retour de congé maternité, ainsi que les moyens pour y parvenir.
Le Comité social et économique est associé à ce suivi et, au-delà de 300 salariés, une commission égalité professionnelle dédiée examine les indicateurs fournis dans la BDESE. Dans les entreprises sans accord, l’employeur peut formaliser une décision unilatérale, après consultation du CSE, qui détaille les actions prévues sur trois ans. Ce document sert de référence lors des contrôles de l’inspection du travail et peut être ajusté chaque année en fonction des résultats de l’index.
Egapro, BDESE et transparence au quotidien : où circulent les données et qui les lit ?
Pour déclarer leur index d’égalité professionnelle, les entreprises d’au moins 50 salariés saisissent leurs résultats sur Egapro, l’outil en ligne du ministère du Travail. Les données remontent aussi dans la BDESE, où elles sont croisées avec les effectifs, les rémunérations, les promotions et les actions correctrices prévues, afin d’assurer une meilleure traçabilité des données pour les représentants du personnel.
Une partie de ces informations est publiée sur Egapro sous forme de note globale et d’indicateurs, ce qui ouvre un véritable accès public aux résultats. Par ce biais, le site joue aussi le rôle de portail ministériel où salariés, syndicats, journalistes ou candidats peuvent consulter les scores et les comparer dans le temps.
À noter : depuis 2020, les entreprises d’au moins 50 salariés doivent publier leur index sur Egapro, sous peine de pénalité pouvant atteindre 1 % de la masse salariale annuelle.
Loi Rixain et directive européenne : vers un index élargi, plus exigeant et plus visible
Votée fin 2021, la loi Rixain impose aux entreprises d’au moins 1 000 salariés de féminiser leurs instances dirigeantes. Les conseils d’administration et les comités exécutifs doivent respecter des quotas de représentation par sexe, avec un palier de 30% cadres dirigeants et membres de l’instance dirigeante à atteindre d’ici 2027, puis 40 % en 2030.
La future transposition de la directive 2023/970 sur la transparence salariale viendra compléter ce mouvement au niveau européen. D’ici au 7 juin 2026, la France devra introduire de nouvelles obligations de publication des écarts de rémunération, de communication des critères de salaire et de correction automatique des différences injustifiées au‑delà d’un certain seuil.
À noter : les exigences issues de la loi Rixain et de la directive sur la transparence salariale s’ajoutent à l’index égalité professionnelle et rendent visibles les écarts de pouvoir autant que les écarts de paie.
Pourquoi l’écart global de 22,2% résiste : dynamiques d’emploi, âges et tailles d’entreprises se répondent
En 2023, l’écart de rémunération entre femmes et hommes atteint toujours 22,2 % tous postes et durées de travail confondus dans le secteur privé. Cet écart salarial global tombe à 14,2 % à durée de travail comparable et à 3,8 % à poste strictement identique, ce qui révèle un faisceau de causes imbriquées plutôt qu’une seule discrimination frontale.
Les écarts restants tiennent aux choix d’orientation, aux temps de travail et aux dynamiques d’emploi qui séparent progressivement les carrières. Avec l’avancée dans la vie active, l’effet de l’âge s’accroît, alors même que la note moyenne d’index atteint 88,5 sur 100 en 2025 et que 94 % des entreprises obtiennent au moins 75 points, ce qui alimente le paradoxe des grandes entreprises dotées de bons scores mais de disparités persistantes.
Le poids du temps partiel dans les trajectoires
Selon les données disponibles pour 2023, 26,5 % des salariées du privé travaillent à temps partiel contre 8,7 % des salariés hommes. Ce décalage massif illustre le poids du temps partiel féminin dans la construction des écarts de rémunération, car les heures manquantes se traduisent en salaires annuels, primes et droits à la retraite amoindris. Les métiers fortement féminisés, comme l’aide à domicile, le commerce ou le nettoyage, concentrent ces contrats à horaires morcelés, ce qui limite l’accès à la formation qualifiante et aux postes à responsabilités. Au final, l’index égalité professionnelle, construit sur des équivalents temps plein, atténue l’impact réel de ces choix de durée de travail sur l’écart global de 22,2 %.
L’effet de l’âge : des écarts qui s’installent et se creusent
Les écarts de salaire sont relativement réduits au début de la vie professionnelle : autour de 4,3 % avant 25 ans entre femmes et hommes. La situation se transforme ensuite, avec un différentiel qui dépasse 20 % dès la cinquantaine et atteint près de 24,9 % après 60 ans. Les premières années de carrière, les maternités, les congés parentaux ou les passages à temps partiel entraînent des bifurcations dans les trajectoires salariales. Une promotion manquée à 30 ans, une mobilité géographique refusée à 35 ans, un retour compliqué après congé de maternité : autant de décisions qui s’additionnent et produisent des écarts cumulés que l’index, calculé sur une seule année, ne met que partiellement en lumière.
Grandes entreprises, grands écarts : un paradoxe à interroger
Les données nationales montrent un écart de rémunération d’environ 17,3 % dans les entreprises de plus de 50 000 salariés, contre 7,2 % dans les très petites structures de moins de 10 salariés. Ce paradoxe interroge, car les grandes sociétés possèdent des services RH outillés, des accords collectifs détaillés et des obligations renforcées en matière de transparence. Les structures de grande taille concentrent un grand nombre de postes très rémunérés, occupés majoritairement par des hommes, tandis que les fonctions support administratives, de relation client ou de services intérieurs restent très féminisées et moins payées. Résultat : l’index égalité professionnelle peut afficher une note supérieure à 90 sur 100, alors que les écarts de rémunération moyens y demeurent plus élevés que dans de petites entités.
À poste identique, l’écart qui subsiste
Lorsque l’on compare des personnes de même âge, avec la même durée de travail et un poste équivalent, l’écart de rémunération résiduel se situe autour de 3,8 %. Ce chiffre, plus faible que l’écart global de 22,2 %, n’en reste pas moins significatif, car il concerne des situations théoriquement alignées. La négociation du salaire d’embauche, la fréquence des augmentations individuelles, le niveau de primes variables ou encore l’évaluation de la performance peuvent favoriser davantage les hommes, même dans un cadre de classification identique. Ce différentiel montre que les stéréotypes de genre et les biais de décision pèsent encore sur les politiques salariales, au‑delà des seules différences de métiers, de temps de travail ou de niveau de qualification mesurés par l’index d’égalité professionnelle.
Au-delà de l’index, une ambition à tenir : faire des chiffres un levier, pas une fin en soi
Au-delà du calcul annuel de l’index, la question centrale reste ce que les entreprises font réellement des résultats. Les scores, parfois élevés, comme une moyenne nationale d’environ 88,5 sur 100 et 94 % d’entreprises au-dessus de 75 points, cohabitent avec un écart salarial global de 22,2 %. L’enjeu est de transformer ces chiffres en de véritables politiques structurelles sur les recrutements, les promotions, les rémunérations et l’accès aux postes à responsabilité.
Pour y parvenir, les données issues d’Egapro, de la BDESE et des futures obligations de la directive européenne 2023/970, à mettre en œuvre d’ici 2026, doivent irriguer le dialogue social. Utilisées pour fixer des objectifs publics et suivre des écarts corrigés, elles peuvent ancrer une véritable transparence durable au sein de l’entreprise.