Le compte à rebours s’accélère pour les employeurs français, sommés d’ouvrir leurs grilles de salaires sous la pression de la directive européenne sur l’égalité de rémunération entre femmes et hommes.
Les directions RH s’interrogent encore sur la collecte des données, le périmètre des postes comparables, la manière de communiquer ces informations à leurs équipes. Les chiffres publiés signalent un manque de transparence salariale réellement opérationnelle dans leurs processus internes, alors que l’échéance 2026 approche et que le retard des entreprises françaises se creuse brutalement.
Un retard massif confirmé par une enquête nationale
Les résultats d’une enquête menée à l’échelle de la France montrent que 93,8 % des entreprises déclarent ne pas être prêtes pour la transparence salariale obligatoire à l’horizon du 7 juin 2026. Présentée comme un sondage national par ses auteurs, l’étude met en lumière l’écart entre les ambitions affichées et la réalité des dispositifs internes.
Les commanditaires de l’étude indiquent que toutes les tailles d’organisation ont été sollicitées, des TPE aux grands groupes. À partir de ce vaste échantillon d’entreprises, les analystes estiment que le taux de conformité réel aux futures règles de transparence reste très bas, malgré les annonces publiées dans les rapports annuels.
Qui est concerné et ce que la loi impose d’ici le 7 juin 2026
La directive européenne sur la transparence salariale vise l’ensemble des employeurs établis en France, quel que soit le secteur d’activité. Le futur texte de transposition précisera le champ d’application selon la taille des effectifs, avec des exigences plus lourdes pour les structures disposant de plusieurs dizaines de salariés.
Les entreprises devront organiser leurs procédures de recrutement et de gestion des carrières pour rendre visibles les critères utilisés et les niveaux de rémunération associés. À partir de cette base, le législateur fixera des obligations légales applicables au 7 juin 2026, date butoir à laquelle salariés et candidats pourront exiger des informations détaillées sur les salaires. Parmi les mesures évoquées, plusieurs obligations peuvent déjà être identifiées.
- Indication d’un niveau ou d’une fourchette de salaire dans chaque offre publiée au sein de l’Union européenne.
- Information claire des candidats sur les critères utilisés pour fixer la rémunération et les perspectives d’augmentation.
- Droit pour les salariés de demander des données agrégées sur les niveaux de salaire moyens, ventilés par sexe pour des postes comparables.
- Mise en place de rapports périodiques sur les écarts de rémunération femmes‑hommes au‑delà d’un certain seuil d’effectifs.
À retenir : la directive (UE) 2023/970 impose aux employeurs européens de se mettre en conformité au plus tard le 7 juin 2026, ce qui pousse déjà nombre de groupes internationaux à revoir leurs politiques de publication des salaires.
TPE et PME à la traîne, ETI et GE en ordre dispersé
Les résultats communiqués par HOW MUCH montrent que, à l’échelle nationale, 93,8 % des sociétés françaises risquent de ne pas disposer d’un dispositif complet de transparence salariale au 7 juin 2026. Les petites structures apparaissent particulièrement exposées dans cette course contre la montre réglementaire.
Les TPE et PME concentrent des retards plus marqués que les ETI et grandes entreprises, avec des écarts par taille qui tiennent à la fois aux arbitrages de priorités RH et aux capacités internes. Les grands groupes ont déjà lancé des projets, quand les plus petites structures restent au stade de l’intention.
| Catégorie | Niveau de préparation | Points de blocage principaux |
|---|---|---|
| TPE | Retard marqué, démarche souvent non engagée | Manque de ressources RH dédiées, faible outillage, faible sensibilisation |
| PME | Projets identifiés mais peu structurés | Priorisation difficile, absence de référent interne sur la transparence salariale |
| ETI | Préparation intermédiaire, diagnostics partiels | Données dispersées, coordination multi-sites ou multi-métiers |
| Grandes entreprises | Projets formalisés, mise en œuvre progressive | Complexité organisationnelle, intégration avec accords existants sur l’égalité professionnelle |
| Ensemble des entreprises | 93,8 % sans dispositif complet d’ici le 7 juin 2026 | Retard global sur la formalisation et le déploiement des outils de transparence |
Des chantiers RH encore bloqués au stade des données et des critères
Pour une large part des directions RH interrogées, les travaux liés à la future obligation de transparence restent cantonnés à des réflexions préliminaires. Les équipes reconnaissent manquer d’une vision exhaustive des rémunérations, ce qui complique l’évaluation précise de l’écart de traitement entre les femmes et les hommes.
La première étape attendue porte sur le nettoyage des données et la structuration de véritables grilles salariales, adossées à des critères objectifs partagés avec les partenaires sociaux. Tant que ces prérequis ne sont pas remplis, le déploiement opérationnel d’un dispositif conforme à la directive européenne reste très partiel dans la majorité des entreprises.
| Étape du chantier RH | Objectif | Niveau d’avancement typique |
|---|---|---|
| Cartographie des rémunérations | Identifier toutes les composantes fixes et variables, par poste et par sexe | Souvent incomplète, données dispersées entre paie, SIRH et fichiers locaux |
| Qualité et nettoyage des données | Fiabiliser les informations de salaire et de classification | Démarrage récent ou à venir, forte hétérogénéité selon la taille de l’entreprise |
| Construction de grilles salariales | Structurer des repères de rémunération par fonction, niveau et ancienneté | Avancée chez certains grands groupes, encore peu formalisée dans les petites structures |
| Définition de critères objectifs | Fixer des règles transparentes pour les hausses et les promotions | Discussions en cours, nécessité de concertation avec les représentants du personnel |
| Déploiement opérationnel du dispositif | Mettre en place les outils, procédures et supports d’information | Largement à venir, avec un risque de concentration des tâches à l’approche du 7 juin 2026 |
Grilles salariales : un fossé de structuration selon la taille d’entreprise
Les premiers effets de la directive européenne sur la transparence salariale révèlent de fortes disparités entre TPE, PME et grandes entreprises françaises. Dans les structures de moins de 50 salariés, la politique de rémunération reste très peu outillée, la couverture par des grilles formalisées demeurant marginale.
À mesure que la taille augmente, les dispositifs se structurent, mais de façon inégale. Les grandes entreprises affichent une meilleure formalisation des critères de classification, tandis que de larges pans de PME laissent encore une faible part des salariés sans référence claire de rémunération, à quelques mois de 2026.
À retenir : 93,8 % des entreprises déclarent qu’elles n’auront pas finalisé un dispositif complet de grilles et critères de rémunération au 7 juin 2026.
Délais internes estimés : entre confiance affichée et incertitudes opérationnelles
Les directions se projettent désormais sur le respect de l’échéance du 7 juin 2026 fixée pour la transparence salariale. De nombreux groupes annoncent des feuilles de route internes, mais le calendrier de projet reste serré pour consolider les données et revoir les politiques de rémunération.
Dans les TPE et PME, les équipes paie et RH signalent déjà des difficultés d’organisation. Le manque de ressources RH dédiées, ajouté aux chantiers techniques sur les systèmes d’information, accroît les risques de retard pour atteindre une conformité complète à la directive 2023/970.
Quelles obligations risquent de ne pas être tenues à temps ?
Selon les premiers retours d’enquête sur l’application de la directive européenne 2023/970, 93,8 % des entreprises françaises n’auront pas, au 7 juin 2026, un dispositif de transparence salariale déployé. Les équipes RH restent focalisées sur la capacité à expliquer la logique globale de rémunération et la façon dont chaque poste se situe dans l’organisation, au regard de référentiels encore incomplets, en cherchant à structurer des critères de rémunération utilisables dans la durée.
Les obligations tournées vers l’extérieur semblent plus délicates à opérationnaliser. La mention de niveaux de rémunération dans les offres d’emploi et la définition de fourchettes de salaire publiables restent en chantier, tout comme un dispositif fiable de reporting écarts F/H accessible aux salariés et à leurs représentants.
Risques juridiques, sociaux et d’image pour les entreprises en retard
Au-delà du calendrier politique, le retard annoncé sur la transparence salariale expose les entreprises à un risque juridique dès la transposition de la directive 2023/970 dans le droit national. Les écarts de rémunération non justifiés pourront être contestés plus facilement par les salariés, avec une charge de la preuve allégée. Dans ce cadre, les inspections et contrôles administratifs pourraient déboucher sur des constats de non-conformité juridique et nourrir une hausse des contentieux prud’homaux liés aux inégalités de salaire.
Sur le terrain social, des écarts de salaire non expliqués risquent d’alimenter tensions internes et perte de confiance. L’exposition sur les plateformes d’avis crée un risque pour la réputation employeur, avec des difficultés de recrutement et davantage de départs volontaires.