« Ma femme m’a dénoncé » : il se fait virer alors qu’il travaillait pour un concurrent pendant son arrêt maladie

Par Frederic Becquemin

Salarié d’une grande entreprise de l’énergie, il pensait dissimuler une activité rémunérée parallèle. Il n’imaginait pas qu’une dénonciation familiale déclencherait une mécanique interne disciplinaire et ouvrirait la voie aux juges.

Formateur expérimenté, il a été écarté plusieurs mois pour des troubles de santé mentale, officiellement reconnu inapte à reprendre ses missions habituelles. Durant cet arrêt maladie prolongé, il animait pourtant des sessions de formation facturées pour un travail pour concurrent, dans l’ombre de sa hiérarchie et loin de toute déclaration à son employeur. Cette révélation a précipité son licenciement.

Un courrier de l’épouse qui déclenche l’enquête : plannings, factures et huit sessions de formation

En juin 2016, la direction d’un grand groupe de l’énergie reçoit un courrier signé de l’épouse d’un salarié, présent dans l’entreprise depuis plus de vingt ans. Elle y raconte que son mari, officiellement déclaré en arrêt pour dépression, continue à travailler pour un concurrent. Cette étonnante lettre de dénonciation pousse l’employeur à vérifier la réalité de ces activités professionnelles pendant tout l’arrêt maladie.

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Alertée, l’entreprise ouvre investigation et contacte la société concurrente pour obtenir explications. La réponse comprend plannings et factures, ce qui permet à l’enquête interne d’établir huit sessions de formation entre novembre 2015 et janvier 2016.

« Mise à la retraite d’office » : ce que prévoit le statut des industries électriques et gazières

En août 2016, l’entreprise convoque le salarié à un entretien préalable, alors qu’il cumule déjà plus de vingt ans de carrière dans les industries électriques et gazières. Trois mois plus tard, une « mise à la retraite d’office » lui est signifiée, comme mesure véritable sanction disciplinaire déguisée.

Ce régime disciplinaire trouve sa source dans un texte de 1946 qui organise les droits et obligations des salariés des entreprises d’électricité et de gaz. Selon le statut IEG, tout travail rémunéré pendant un arrêt maladie constitue une faute grave automatique, même sans préjudice réel démontré.

De l’entretien disciplinaire aux juges : la faute grave confirmée malgré l’absence de préjudice

À l’été 2016, après un entretien formel, l’entreprise décide d’engager une action contre le salarié. Ce dernier conteste sa mise à la retraite d’office et saisit le conseil de prud’hommes, dans le cadre d’une procédure disciplinaire, en réclamant plus de 140 000 euros de dommages et intérêts.

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Sa demande est rejetée en première instance, les juges estimant que les faits clairement justifient une rupture immédiate du contrat. Une décision de cour d’appel, rendue en avril 2024 puis confirmée par la Cour de cassation en juin 2025, retient que l’absence de préjudice ne supprime pas la faute grave.

Un rappel utile pour le privé : travailler pendant un arrêt n’est pas automatiquement fautif

Pour les salariés du secteur privé, la situation juridique se révèle plus nuancée. L’avocat Roman Guichard rappelle que, selon le droit commun du travail, exercer une activité durant un arrêt maladie n’entraîne pas forcément un licenciement, si l’employeur ne subit aucun dommage direct et caractérisé.

Les juges s’attachent surtout à vérifier l’existence d’une concurrence frontale avec l’employeur d’origine et l’usage des horaires d’arrêt. Ils rappellent que l’obligation de loyauté subsiste, mais qu’une activité légère, compatible avec la santé, reste admise si elle ne nuit pas à l’entreprise ni à la réputation globale de l’employeur.

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