La grande évasion des diplômés industriels : mais où sont-ils passés ?

Par Solene Alonso

Il semble qu’un phénomène étrange se produit dans le secteur industriel français. Chaque année, une horde de jeunes diplômés sort des écoles, armée de connaissances et de compétences fraîchement acquises, prête à conquérir le monde industriel.

Pourtant, il apparaît que la moitié de ces diplômés disparaissent mystérieusement du secteur. On pourrait les qualifier de “diplômés fantômes”. Qu’est-ce qui pousse ces jeunes talents à quitter le secteur pour lequel ils ont été formés ? Et comment cela affecte-t-il l’industrie elle-même ?

Cette situation est d’autant plus intrigante que l’industrie française est en manque criant de compétences. Les entreprises cherchent désespérément des techniciens de maintenance, des soudeurs, des tourneurs fraiseurs… Des postes restent vacants, malgré un flux constant de nouveaux diplômés. Un véritable paradoxe qui mérite d’être exploré.

D’après une étude récente menée par la Fabrique de l’Industrie, environ 125 000 jeunes sortent chaque année des formations aux métiers industriels avec un niveau allant du CAP au BAC +2. En face, les besoins de l’industrie oscillent entre 90 000 et 110 000 par an. Théoriquement, il y a assez de diplômés pour répondre à la demande. Alors, où est le problème ?

Ce défi est immense, mais avec une volonté commune et une action concertée, nous pouvons faire en sorte que nos diplômés industriels ne soient plus des “fantômes”, mais bien les acteurs clés d’une industrie dynamique et prospère.

La disparition mystérieuse des diplômés industriels

Il semblerait que le problème ne réside pas dans le nombre de diplômés formés, mais plutôt dans ce qui se passe après l’obtention du diplôme. Guillaume Basset, co-auteur de l’étude de la Fabrique de l’Industrie, estime que “près de la moitié de ces jeunes diplômés s’évaporent”. Il n’existe pas de chiffres officiels pour corroborer cette affirmation, mais le constat sur le terrain semble le confirmer.

Lire aussi :  Comment calculer la gratification nette d'un stagiaire : méthodes et exemples

Qu’est-ce qui pousse ces jeunes à quitter le secteur industriel ? Selon l’étude, un tiers de ces diplômés ne rejoignent pas le marché du travail dans les trois ans suivant l’obtention de leur diplôme. Parmi ceux qui y accèdent, un autre tiers se dirige vers des métiers éloignés de l’industrie pour laquelle ils ont été formés. Ainsi, seuls 8% des jeunes diplômés en 2017 dans des filières “technologies industrielles fondamentales” travaillaient trois ans plus tard dans l’industrie. Un chiffre alarmant qui soulève de nombreuses questions sur l’efficacité des formations industrielles et l’orientation des jeunes.

L’impact sur l’industrie et la dépense publique

Ce phénomène a des conséquences majeures sur le secteur industriel et sur la dépense publique. Les entreprises peinent à trouver les compétences dont elles ont besoin pour produire, malgré un afflux constant de nouveaux diplômés. Aussi, les formations industrielles sont financées par l’argent public. Est-ce la meilleure façon d’utiliser cette ressource ?

"Même si on n’aura jamais 100 % des jeunes formés pour l’industrie qui y travaillent, on doit pouvoir faire mieux, avec une approche plus fine, plus territoriale et in fine moins coûteuse".
Olivier Lluansi, co-auteur de l’étude

Les experts appellent à une réflexion plus approfondie sur la qualité des formations et leur adéquation avec les besoins du marché du travail. Ils plaident pour une offre de formation plus proche des territoires et donc plus accessible pour les jeunes. Une mutualisation accrue des plateaux techniques est aussi préconisée pour éviter leur dispersion. Ils insistent sur la nécessité de revaloriser les métiers de l’industrie pour attirer et retenir les jeunes talents.

Lire aussi :  Gratification des stagiaires dans les entreprises Syntec : ce qu'il faut savoir

Des solutions à explorer

Face à ce défi complexe, plusieurs pistes sont proposées par les experts. La première est de renforcer l’adéquation entre la formation et les besoins du marché du travail. Cela implique une analyse fine des compétences requises par les entreprises et une adaptation en conséquence des programmes de formation. Il faut également penser à la mobilité des jeunes.

"Les centres de formation ont élargi leur zone de recrutement, mais les jeunes restent peu mobiles".
Olivier Lluansi

Une autre solution consiste à revaloriser les métiers de l’industrie auprès des jeunes. Il est capital de changer la perception négative souvent associée à ces métiers et de montrer qu’ils offrent de réelles opportunités d’épanouissement professionnel et personnel. Pour finir, il est indispensable d’améliorer l’accès aux données pour affiner le diagnostic et prendre des décisions éclairées.

Un défi majeur à relever

La disparition mystérieuse des diplômés industriels est un véritable casse-tête pour le secteur industriel français. Il est urgent d’identifier les causes profondes de ce phénomène et de mettre en place des solutions efficaces. Cela nécessite une collaboration étroite entre les acteurs de la formation, les entreprises industrielles et les pouvoirs publics. Le futur du secteur industriel en dépend.

"Il faut repenser notre système de formation pour qu'il soit vraiment au service du développement industriel".
Guillaume Basset

Ce défi est immense, mais avec une volonté commune et une action concertée, nous pouvons faire en sorte que nos diplômés industriels ne soient plus des “fantômes”, mais bien les acteurs clés d’une industrie dynamique et prospère.

IA

Notre site est un média approuvé par Google Actualité.

Ajoutez Mediavenir dans votre liste de favoris pour ne manquer aucune news !

nous rejoindre en un clic
google news follow

Rejoignez la communauté

6 réflexions au sujet de “La grande évasion des diplômés industriels : mais où sont-ils passés ?”

  1. Mort de rire .. les entreprises du secteur industriel passe uniquement par des intérimaires / cdd résultat tu touche ton cdi après 7 ans (4ans intérim avec coupure+ 3 cdd ) .. 7 ans dans une boîte , 4 ans d’ancienneté la bonne blague .. sauf pour les +2 et plus , c’est la merde , aucune liberté d’entre prendre, 3/8 donc pas de vie famille , tout ça pour un smic , la blague du patronat français .. perso j’ai fais 2 mois en France puis direction la Belgique. Vous voulez jouez au marché de l’emploi européen , et bien vous en subissez les conséquences . Les patrons ont délocalisé 80 % des usines en chine et Europe de l’Ouest / defoncer le droit du travail et maintenant ils ce plaignent que cela n’attirent pas . Et si vous voulez savoir pourquoi l’industrie a autant de mal en France , ba demander au premier concerner.. les personnes qui ont eu leur diplômes les années précédentes . Au lieu de demander à des gens hors sol qui ne sont même pas concerné par la problématique.

    Répondre
    • Très bonne analyse. C’est également ce que j’ai constaté en échangeant avec des opérateurs de l’industrie. Je ne suis pas concernée car j’ai un Bac+3, je n’ai jamais fais d’intérim, juste 1 CDD et que des CDI après, avec 2 périodes de chômage (une après l’obtention du diplôme et l’autre après le CDD). Donc mon profil valide votre analyse. J’ai toujours cherché à discuter avec les opérateurs pour connaître les éléments qui ont fait qu’ils se démotivaient : à part les personnes en fin de carrière qui se contentent de ce qu’ils ont pu glaner à une époque où on pouvait encore évoluer en partant de la base en attendant leur retraite, les autres étaient en intérim et très peu de CDI étaient proposés. Sinon le salaire n’est souvent pas intéressant car juste le SMIC pour des travaux souvent contraignant. Pourquoi se fatiguer et se tuer la santé pour juste un SMIC alors qu’en plus l’inflation est passée par là ?

      Après l’industrie est frileuse également car on leur fait souvent faux bon mais en même temps, si elles revalorisaient les salaires et autres avantages, les gens resteraient peut être un peu plus non ?

      Répondre
  2. Je suis opérateur machine dans une company industrielle agro-alimentaire depuis 15 ans d’expérience j’ai recherches autre d’emploi et expérience professionnelle merci beaucoup

    Répondre
Laisser un commentaire